Bordeaux est le symbole et le modèle du grand vin à travers le monde. Ses crus classés et le savoir-faire de ses œnologues s’exportent jusqu’en Chine. En France, il donne le la du millésime : une grande année est d’abord une grande année pour les vins de Bordeaux. Pour les vins rouges, s’entend, car le grand vin est évidemment rouge… Mais le Bordelais ne se limite heureusement pas à cela. Visite guidée.
La renommée de Bordeaux repose sur ses grands crus et ses appellations prestigieuses. Pour comprendre le vignoble bordelais, il est utile de les prendre pour guide. Mais on aura aussi à cœur d’emprunter quelques chemins de traverse afin d’embrasser toute la diversité de la région.
Les appellations « phares » se trouvent dans deux régions distinctes délimitées par des fleuves.
La Rive gauche : Médoc et Graves
Sur la rive gauche de la Garonne et de l’estuaire de la Gironde se trouvent les AOC (margaux, pauillac, saint-julien, pessac-léognan…) et les châteaux célèbres : Mouton-Rothschild, Haut-Brion, Latour, Lafite-Rothschild…
Une notoriété gravée dans le marbre, car ces crus sont reconnus depuis fort longtemps : le classement du Médoc a été établi en 1855, et celui des Graves dans les années 1950 !
Les vins font la part belle au cabernet-sauvignon, cépage qui donne des vins charpentés, que vient compléter le merlot, plus rond et aimable.
Bref, du carré, aussi bien dans les propriétés que dans le verre.
La Rive droite : Saint-Emilion et Pomerol
Sur la rive droite de la Dordogne, autour de la ville de Libourne (dans le « Libournais », donc), on rencontre Saint-Emilion et Pomerol, qui affichent un caractère plus « paysan » : bâtisses moins imposantes, propriétés plus petites ; et une place privilégiée au merlot (complété du cabernet franc), qui donne des vins d’un abord plus aimable.
Le classement des crus vient confirmer ce caractère : si celui de Saint-Emilion date des années 1950 (comme les Graves), il est révisable tous les dix ans. Signe qu’il n’y a théoriquement pas de position acquise, ce qui n’empêche aucunement les grandes réussites sur le long terme (Angélus, Ausone, Cheval-Blanc…). Et à Pomerol, fief du célébrissime Pétrus, il n’existe même pas de classement officiel.
Dans l’ombre des grands crus
Les crus prestigieux étant quasi inabordables, on se dirigera avec profit vers des AOC moins connues mais de belle qualité :
- Dans le Médoc : les appellations médoc, haut-médoc ou moulis.
- Autour de Saint-Emilion et Pomerol : les AOC fronsac, canon-fronsac et lalande-de-pomerol, ou encore castillon-côtes-de-bordeaux.
- Sans oublier, plus au nord, les blaye et côtes-de-bourg au rapport qualité-prix souvent imbattables.
Dire qu’il n’y a que les rouges qui comptent à Bordeaux, c’est aller vite en besogne. La région possède aussi des vins blancs de qualité, voire d’excellence, aussi bien en sec qu’en liquoreux, produits à partir des cépages sauvignon et sémillon (que complète une pointe de muscadelle).
Les vins blancs secs
On en trouve beaucoup sous étiquette « bordeaux » ou « entre-deux-mers » (région qui tire son nom de sa situation géographique « entre deux fleuves », la Garonne et Dordogne) : des vins plutôt charnus et frais, parfaits compagnons des fruits de mer et des poissons.
Les meilleurs blancs viennent de la région des Graves, évoquée plus haut à propos des rouges, et notamment du nord de cette région où l’appellation pessac-léognan réunit les meilleurs crus, dont certains sont même classés (Haut-Brion, Carbonnieux, Chevalier…). Délicats, concentrés et d’une grande complexité, ce sont des vins assez puissants qui peuvent être bus jeunes mais gagnent à être attendus jusqu’à une dizaine d’années.
Les vins blancs doux (liquoreux)
Bien que moins consommé qu’auparavant, le sauternes demeure l’archétype du vin liquoreux. Issus de raisins atteints de pourriture noble vendangés grain à grain, ces vins aptes à une grande garde allient richesse et finesse, et affichent un bouquet d’une belle complexité (miel, citron, orange confite, fleur d’acacia…). Cette AOC possède aussi ses crus classés dont le plus célèbre est Yquem.
Des appellations voisines produisent également des liquoreux aux prix souvent plus doux : sainte-croix-du-mont, loupiac…
Le conseil de Jean
Il est assez à la mode de faire du « bordeaux bashing », et la région y a sans doute contribué par certains de ses excès. Il n’en reste pas moins qu’elle produit des vins parmi les plus grands du monde, et déguster un vieux millésime de Bordeaux reste un moment privilégié. Ne passez pas à côté par excès… de snobisme !